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vendredi 27 mai 2016

Toujours des accouplements de faucon pèlerin dans le secteur de l'Université de Montréal

Ces 2 derniers jours, j'ai observé 2 accouplements de faucon pèlerin dans le secteur de l'Université de Montréal, dont un à l'extérieur du campus. Ces accouplements, qui sont vraisemblablement l’œuvre de Spirit et du nouveau mâle, font partie des tentatives de ces faucons pèlerins de produire une nouvelle couvée après l'échec fin avril de la couvée de Spirit et Éole. Les faucons partageaient leur temps entre l'Université de Montréal, Rockhill (spécifiquement,l'antenne de télécommunication), l'Oratoire Saint-Joseph et possiblement d'autres endroits non identifiés. Dans cet article, je vais décrire mes observations, essayer d'expliquer les difficultés auxquelles font face les faucons pour produire une autre couvée, et terminer avec une petite note d'espoir en rapportant des cas où une 2ième couvée a été produite après une interruption de la première couvée plus tardive que dans le cas de l'Université de Montréal.

Mais d'abord quelques mots de contexte. Spirit a recommencé à s'accoupler au matin du 3 mai, moins de 48 heures après l'apparition du nouveau mâle. Plusieurs accouplements ont été observés dans les jours qui ont suivi. Le dernier accouplement à avoir été documenté remonte au 17 mai et a été capté par la caméra de Faucons de l'UdeM.


Mes observations

Accouplement sur l'antenne de télécommunication de Rockhill 

Le 25 mai autour de 14h, après avoir fait le tour de l'Université de Montréal sans voir aucun faucon, je me suis rendu à l'Oratoire Saint-Joseph. À14h23 j'ai vu passer brièvement un faucon, sans que je puisse cependant déterminer l'espèce. J'ai revu ensuite un faucon à 15h27 qui semblait venir de la direction de l'Université de Montréal. Après quelques passages il est allé se percher sur l'antenne de Rockhill. Je suivais la scène aux jumelles. À 15h30 un autre faucon est apparu en vol près de l'antenne, et a semblé se poser à la même place que le premier. Alors qu'il était apparemment posé il a battu des ailes à 5 ou 6 reprises puis s'est envolé et est allé se percher plus bas sur l'antenne: accouplement!

La photo ci-dessous  a été prise environ 15 minutes plus tard et montre un faucon pèlerin sur l'antenne là où a eu lieu l'accouplement.



Un faucon y était toujours à 16h22.

 

Les faucons à l'Oratoire Saint-Joseph

Le 26 mai à 8h18 j'ai entendu un cri de faucon pèlerin à l'Oratoire Saint-Joseph. À cause du soleil je n'ai pas pu le voir mais 5 minutes plus tard j'ai vu un faucon de grande taille - donc vraisemblablement Spirit - voler en direction de l'Université de Montréal. À 8h27 un faucon était visible sur la tour de l'Université de Montréal. Il a disparu de son perchoir peu après.

Il ne s'est plus rien passé pendant une heure. Je m'apprêtais à quitter l'Oratoire pour aller jeter un coup d’œil à l'université quand j'ai remarqué à 9h35 depuis la rue Queen Mary qu'un faucon était perché juste à côté de l'ornement central de la façade avant de l'Oratoire, et qu'un 2ième faucon était en vol tout près. Ce dernier s'est posé sous la partie gauche du toit, là où un couple de corbeaux avait construit un nid plus tôt ce printemps (le nid a vraisemblablement été retiré depuis puisqu'on ne voit plus aucune branche dépasser). Le faucon est ensuite allé se percher sur l'ornement gauche.


Les faucons sont restés ainsi pendant presque 1 heure. On entendait celui de gauche huir régulièrement, et parfois pousser un cri plus énergique. À 10h23, le faucon du centre (vraisemblablement Spirit) s'est envolé, suivi par celui de gauche.

2 minutes plus tard à 10h25, un faucon était de retour et s'est perché à gauche d'une jonction entre 2 corniches.


J'ai quitté les jardins de l'Oratoire d'où je l'observais à 11h07 pour tenter de repérer, sans succès, l'autre faucon.  À 11h19 le faucon n'était plus visible sur sa corniche.

À 11h30 un faucon pèlerin était perché sur l'antenne de Rockhill. Il a quitté à 11h46 en direction de l'Université de Montréal. Je suis allé à l'Université de Montréal examiner les facades de la tour mais je n'ai rien vu.

Accouplement à l'Université de Montréal

En fin d'après-midi aucun faucon n'était visible à l'Oratoire Saint-Joseph ni sur l'antenne de Rockhill. J'ai donc fini par aller à l'Université de Montréal. J'y ai trouvé à 19h18 les 2 faucons sur 2 façades différentes de la tour: un premier faucon était perché au coin de la façade avant et de la façade donnant sur le pavillon André-Eisenstadt; l'autre sur la façade donnant sur l'École Polytechnique. À 19h42, les 2 faucons se sont envolés quasiment simultanément. Le mâle est revenu se percher sur la façade Polytechnique, malheureusement j'ai perdu la trace de la femelle.  On pouvait entendre à plusieurs reprises des cris de communication.

Un bref accouplement a eu lieu à 19h58: la femelle était perchée au milieu de la façade avant, un niveau au-dessus du nichoir. Le mâle est ensuite allé se percher sur le plot blanc le plus à droite de la façade avant, d'où il s'est envolé à 20h12. La femelle n'avait toujours pas quitté son perchoir à 21h quand j'ai arrêté l'observation.



Un obstacle physiologique à une éventuelle nouvelle ponte

Les faucons pèlerins de l'Université de Montréal continuent à s'accoupler mais ce n'est pas suffisant pour pondre à nouveau: Spirit est peut-être déjà sortie de la période où elle peut pondre.

En effet les faucons pèlerins - comme plusieurs autres espèces animales - ne peuvent pas avoir de bébés à n'importe quelle période de l'année. Au début de la saison de reproduction, sous l'influence de différentes hormones, les organes reproductifs du mâle et de la femelle augmentent significativement en volume et en masse. Plus spécifiquement j'ai en tête une augmentation de volume de 8 fois pour les organes reproductifs de la femelle. Je n'arrive plus à retrouver ce chiffre mais j'ai sous les yeux une image des organes reproductifs de la femelle avant et pendant la période de reproduction, tirée des notes de cours fournies par Faucon-Éduc lors d'un cours d'introduction à la fauconnerie que j'avais suivi. À vue d’œil, le chiffre de 8 est possible. La nature fait bien les choses: dès que ces organes ne sont plus utiles, ils reviennent progressivement à leur taille habituelle. Pour qu'une ponte puisse avoir lieu, il faut évidemment que les organes reproductifs soient encore suffisamment fonctionnels.

Quand les organes reproductifs commencent-ils à régresser?  D'après le livre "Le faucon pèlerin: description, mœurs, observation, protection, mythologie..." de René-Jean Monneret, le début de la régression des organes reproductifs chez la femelle coïncide avec la mue, laquelle commence généralement avec la ponte du dernier œuf (p. 31). La LPO (= Ligne pour la Protection des Oiseaux, l'organisme en charge du suivi du faucon pèlerin en France) ne s'engage pas dans ces considérations biologiques mais écrit "Si la première couvée est détruite dans un délai de 8 à 12 jours après la ponte du dernier œuf, il peut y avoir une ponte de remplacement". À titre indicatif, le dernier œuf a été pondu à l'Université de Montréal le 8 avril et les faucons continuaient à couver par intermittence au moins jusqu'au 30 avril.

Bien entendu il pourrait y avoir des variations pour les faucons pèlerins d'Amérique du Nord, mais le principe reste sans doute le même: à un certain moment, les organes reproductifs régressent et la ponte n'est plus possible.

Mentionnons que ce n'est pas la première fois que Spirit est confrontée à cette situation. En 2012, elle et Roger - son compagnon de l'époque - avait aussi tenté de relancer la machine après l'échec de leur nidification à l'Oratoire Saint-Joseph (la tour de l'Université de Montréal était alors en travaux et le nichoir avait du être retiré cette année-là). Rien n'indique qu'elle ait réussi à pondre de nouveaux œufs.

Malgré les difficultés d'une seconde ponte après un échec tardif de la première nidification, certains couples de faucon pèlerin réussissent. Ça a été le cas en particulier pour 2 couples de faucon pèlerin du Minnesota en 2013.

Des cas de seconde ponte réussie en Amérique du Nord

Les 2 cas de seconde ponte réussie qui suivent sont documentés sur le site de Birds Cam Around World (BCAW), un site qui répertorie les nids de faucons pèlerins (et quelques autres espèces d'oiseaux) suivis par caméra à travers le monde. Une section est d'ailleurs consacrée aux faucons pèlerins de l'Université de Montréal.

Lansing (Minnesota, USA, 2013)

L'histoire de ce couple de faucon se trouve ici sur le site de BCAW.  La femelle a pondu son premier œuf le 1er avril 2013 (notez que c'est exactement le même jour de l'année que Spirit en 2016). À la date prévue pour l'éclosion: rien. Ni les jours suivants. Après plus d'une semaine de retard, le 20 mai, la décision a été prise de retirer les œufs, en espérant que cela provoquerait une seconde ponte.

Le 4 juin, surprise: un nouvel œuf avait fait son apparition, bientôt suivi par 2 autres œufs! Malheureusement le scénario de la première ponte s'est répété: les œufs n'ont pas éclos. Mais la femelle avait réussi à pondre de nouveau.

Allen S. King Generating Plant - Xcel Energy - (Minnesota, USA, 2013)

Voici le lien de BCAW. Le premier œuf de la première ponte a été pondu le 17 avril. 2 fauconneaux sont nés mais sont décédés dans les 3 premiers jours, les 12 et 13 juin. La femelle a pondu à nouveau en juillet. Cette seconde couvée n'a pas abouti, peut-être à cause de la chaleur.




 


jeudi 26 mai 2016

Présence d'oeufs très probable chez les faucons pèlerins de l'Incinérateur des Carrières

Depuis le 3 mai au moins, le comportement des faucons pèlerins à l'Incinérateur des Carrières est entièrement tourné vers la nidification: les attaques sur les corbeaux visent à apprendre à ceux-ci à se tenir loin de l'endroit que les faucons ont choisi pour leur nid (au grand désarroi des faucons sans doute, les corbeaux se sont révélés être de très mauvais élèves! La raison en est bien sur qu'ils ont eux-mêmes un nid dans ce secteur); les visites régulières des faucons à un endroit situé entre la cheminée Est et le bâtiment de l'Incinérateur trahissent l'emplacement choisi pour le nid. Quant aux accouplements il n'est pas nécessaire d'expliquer le lien avec la nidification!

Cette tentative de nidification est remarquable pour au moins deux raisons. D'abord, pour autant que je sache, elle établirait un nouveau record pour la date la plus tardive de nidification du faucon pèlerin à Montréal. Et ensuite elle se fait à proximité d'un nid de corbeaux, alors que les deux espèces sont connus pour ne pas s'aimer. Là aussi un record, celui de la plus petite distance entre les nids des deux espèces, pourrait être approché, voire battu.

Dans cet article, je décris 2 observations qui suggèrent une longue présence du mâle au nid. Comme le nid - et a fortiori son éventuel contenu - n'est pas directement visible, une telle présence du mâle est le meilleur indice possible de la présence d’œufs.  En m'appuyant sur des observations additionnelles, j'essaie ensuite de déterminer quand la couvaison aurait pu commencer. Finalement je me risque à prédire des naissances à partir du 21 juin.

Mise en évidence d'une longue présence du mâle au nid 

Motivation

Considérant la date tardive et le défi posé par la présence des corbeaux (les faucons ont possiblement perdu beaucoup de temps et d'énergie dans ce conflit), il était légitime de se poser la question si les faucons arriveraient à franchir la première étape, c'est-à-dire la  ponte d’œufs. Comme le nid n'est pas visible, il fallait pouvoir distinguer indirectement entre les 2 scénarios suivants:
  • Scénario A: la femelle essaie en vain de pondre. Dans ce scénario la femelle passerait une partie appréciable du temps au nid; le mâle visiterait également le nid, pour voir si un œuf est enfin arrivé, mais ne devrait pas rester longtemps: en effet un faucon aime les espaces ouverts et les hauteurs, il lui faut donc une bonne raison de rester dans cet endroit sombre et clos.
  • Scénario B: un œuf a été pondu. A partir d'un certain moment, généralement la ponte de l'avant-dernier œuf, les faucons commencent à couver, de façon à maintenir la température des œufs autour de 37-38C (d'après le site FalcoPeregrinus.org). Le mâle participe à la couvaison et devrait donc passer un temps appréciable au nid.
Pour distinguer entre ces 2 scénarios, il fallait donc mettre en évidence une longue présence du nid du mâle. Une tâche pas si facile que ça parce que le nid a 2 entrées - de part et d'autre de la cheminée - et que ça ne prend pas plus 2 secondes à un faucon pour apparaitre de nulle part et entrer au nid, ou au contraire pour en ressortir et disparaitre de vue. Idéalement j'aurais aimé procédé de la façon suivante:
  1. Repérer un faucon à l'extérieur et l'identifier comme étant le mâle;
  2. Le voir entrer au nid;
  3. Filmer sans interruption les entrées du nid pour être sur qu'il reste au nid (je m'étais fixé une durée minimale de 30 minutes pour parler de "longue présence").
  4. Voir un faucon sortir et l'identifier comme étant le mâle.
Mais typiquement une ou plusieurs de ces étapes échoue: par exemple les changements de batterie ou de carte-mémoire de l'appareil empêchent de filmer en continu; ou alors le faucon entrant ou sortant ne se laisse pas identifier. Je me suis donc contenté de 2 observations imparfaites, qui prises ensemble, me permettent de conclure, avec un faible risque d'erreur, que le mâle a bien passé une longue période au nid (à ces observations s'ajoutent bien entendu d'autres observations où l'impression subjective était que le mâle était longtemps au nid).

Observation du 23 mai

Une petite distraction due au passage d'un train m'a sans doute empêché de faire une observation presque parfaite...

Quand je suis arrivé vers 6h du matin, le mâle était à l'extérieur. À plusieurs reprises par la suite on pouvait entendre la femelle alarmer depuis le nid. À 7h03 le mâle est allé se percher tout près de l'entrée droite du nid, sur le garde-fou au coin sud-est du toit de l'incinérateur. Vers 7h20 je quitte le faucon des yeux pour jeter un coup d’œil au train qui passait derrière moi. Quand je me suis retourné le mâle avait disparu de son perchoir... Le bruit du train empêchait d'entendre une éventuelle discussion au nid. Je n'ai pas vu de faucon sortir.

À 7h39, un faucon pèlerin se perche sur la passerelle en-dessous de la passerelle circulaire à mi-hauteur de la cheminée Ouest: c'est la femelle! Le train m'a donc vraisemblablement fait rater sa sortie. Je commence alors à filmer les entrées du nid.

À 9h03, la femelle se rend au nid par la gauche, on entend de la discussion, un faucon en sort par la droite et disparait immédiatement vers la rue des Carrières.




Dans la mesure où la vidéo ne montre aucune sortie du nid avant 9h04 le mâle était possiblement au nid depuis au moins 7h39, soit une présence au nid d'au moins 1h25. Mais cette observation a plusieurs défauts. D'abord il y a eu 5 petites interruptions dans la surveillance vidéo de 5s, 31s, 1mn25, 1mn43 et 2mn06 pour différentes raisons (changement de carte-mémoire, changement de batterie, arrêt automatique de la caméra après 30mn, prises de photo pour identifier la femelle, etc). Ces interruptions ne sont peut-être pas si graves que ça dans la mesure où j'observais aussi, et que la femelle aurait probablement réagi si le mâle était sorti/entré; de plus, à part une interruption de 5s, la surveillance vidéo montre qu'il n'y a pas eu d'entrée/sortie dans les 31 minutes qui ont précédé le retour de la femelle au nid; or 30 minutes de présence du mâle était la cible que je m'étais fixée. Le principal défaut est autre: la femelle a pu entrer dans un nid vide, vocaliser puis ressortir. Je ne pense pas que cela a été le cas mais ce n'est pas impossible.

Observation du 25 mai

Quand je suis arrivé à 6h, la femelle était à l'extérieur et on pouvait l'entendre huir régulièrement, ce qui suggérait qu'un autre faucon était présent. J'ai commencé à filmer les entrées du nid à 6h12. À 7h13 un faucon est sorti du nid et s'est perché sur le mur près du coin sud-ouest: les photos montrent qu'il s'agit d'Éole. La femelle a rejoint le nid 30 secondes plus tard.


Éole après son séjour au nid

Cette observation suggère qu'Éole était au nid pendant 1 heure. Comme dans l'observation précédente, il y a quelques trous dans la surveillance vidéo: un de 3 secondes, l'autre de 1mn12 (changement de batterie), qui aurait pu être mis à profit par le mâle pour entrer au nid. Je considère cela comme peu probable à cause des huiements de la femelle et parce que je gardais un œil sur les entrées du nid.

Plusieurs types de relai

Chez les faucons pèlerins le mâle et la femelle couvent à tour de rôle. Les faucons pèlerins de l'Incinérateur des Carrières ont différentes façons de se relayer au nid.

Du point de vue de l'observateur le type de relai le plus intéressant est lorsqu'un des faucons sort du nid puis quelques instants plus tard l'autre faucon rejoint le nid. Dans ce type de relai il est clair que 2 faucons sont impliqués et qu'il y a quelqu'un au nid avant et après le relai.

Le plus souvent toutefois, on voit un faucon entrer au nid puis quelques instants plus tard un faucon sortir. Et là se pose la question: a-t-on vu 2 faucons différents ou bien était-ce le même ? Si le faucon qui est sorti n'est pas le même que celui qui est entré, on a un relai et on peut affirmer qu'il y avait quelqu'un au nid avant et après. Si au contraire le faucon qui est sorti est le même que celui qui est entré, il ne s'agit pas d'un relai et on se retrouve avec les 2 possibilités suivantes: un faucon a brièvement visité un nid vide, ou un faucon a brièvement visité un nid occupé par l'autre faucon.

Généralement lorsque 2 faucons se retrouvent ensemble au nid on entend des vocalises provenir de derrière la cheminée. Mais entendre ces vocalises ne signifie pas nécessairement qu'il y a 2 faucons au nid, et inversement ne pas les entendre ne signifie pas nécessairement qu'il n'y a qu'un seul faucon au nid! D'abord rien n'empêche un faucon d'aller dans un nid vide et de se mettre à monologuer, ou bien à discuter avec un faucon qui se trouve quelque part à l'extérieur (c'était ce qui s'est passé lorsque la femelle essayait d'attirer un mâle au nid en avril). Par ailleurs tout comme en 2014 les faucons pratiquent parfois des relais silencieux... Souvent, la seule façon de déterminer qu'il y a bien eu un relai est d'identifier à la fois le faucon qui est entré et le faucon qui est sorti et de constater que ces 2 faucons sont différents. Personnellement je me fie sur les pattes: le mâle est bagué aux 2 pattes, alors que la femelle n'est pas baguée du tout.

Pour finir avec les relais, à quelques reprises j'ai assisté à la scène suivante: un faucon entre au nid avec une proie, puis quelques instants plus tard un faucon sort du nid avec la proie. Dans ce cas il est très probable qu'il s'agissait de deux faucons différents: le premier faucon a offert la proie au second, qui est ressorti avec pour le manger à l'extérieur. Ce genre de scène a été observé à plusieurs reprises au nichoir de l'Université de Montréal en avril.


S'il y a eu ponte, quand cela s'est-il produit ?

On pourrait aussi se demander à quel moment la couvaison a commencé ? (la couvaison commence en principe à partir de la ponte de l'avant-dernier œuf). Il n'est malheureusement pas possible de donner une réponse précise à ces questions mais je vais rapporter quelques observations qui peuvent donner des indices.

  • La femelle a probablement commencé à dormir à l'Incinérateur le 5 mai. En effet on pense que cette femelle dormait à l'église Saint-Jean-Baptiste avant. Or j'ai observé un faucon à cet endroit le 4 mai, mais ni le 5 ni le 6. 
  • Autour du 12 mai, j'ai observé un changement de comportement des faucons, en particulier je ne voyais plus la femelle attaquer les corbeaux. Une des explications que j'avais envisagée était une fatigue due entre autre à une ponte imminente. 
  • Les 15, 16 et 17 mai, j'observe des mouvements des faucons qui suggèrent qu'ils pourraient être sur le point de déménager. Ces observations m'ont amené à visiter différents sites alternatifs possibles, situés dans la direction de leurs déplacements, sans succès.
    • 15 mai: 17h40: accouplement; 17h43: le mâle va au nid et en ressort moins de 2 minutes plus tard; 17h54: la femelle s'envole en direction du Parc Laurier; 17h58: je remarque qu'un faucon est de nouveau présent tout en haut de la cheminée ouest, j'ignore si c'est la femelle qui est de retour ou si c'est le mâle; 18h10: ce faucon quitte également en direction du Parc Laurier; 18h26: je quitte à mon tour.
    • 16 mai: de 17h28 à 18h47, aucun signe de présence de faucon. À 18h47 je remarque un faucon tout en haut de la cheminée Ouest. Ce faucon a quitté à 19h15 en direction du Parc Laurier.
    • 17 mai: à 16h13, j'étais en train de franchir l'avenue Christophe Colomb quand les 2 faucons sont passés au-dessus de moi, venant de la direction du métro Rosemont et se dirigeant vers l'Incinérateur. Un peu plus tôt, à 16h04 j'avais vu un faucon quitter le nid et s'éloigner vers le métro Rosemont. Rien n'indiquait qu'il poursuivait un intrus.
    Si les faucons ont vraiment cherché à déménager, il n'y avait pas encore d’œufs à l'Incinérateur à ce moment-là. Mais les déplacements pouvaient aussi être des déplacements ordinaires. En revanche le 17 mai les 2 faucons avaient quitté ensemble l'Incinérateur. Il n'est pas clair si cette absence permet de conclure qu'il n'y avait pas d’œuf; tout dépend sans doute de la durée de l'absence et de la distance où étaient les faucons. Les corbeaux sont probablement assez intelligents pour ne pas s'engager dans l'étroit couloir qui abrite le nid des faucons pèlerins, puisqu'ils seraient très vulnérables à une réaction très violente des faucons pèlerins.
  • Le 19 mai, suite à un accouplement qui a eu lieu vers 19h30, les 2 faucons sont restés à l'extérieur jusqu'à 20h22, moment où la femelle est allée au nid, soit une absence au nid de plus de 50 minutes. Ce jour-là la température maximale à Montréal était de 19.4C d'après les archives de Météomédia
  • À ma connaissance aucun accouplement n'a été observé après le 19 mai.
  • 23 mai: probable longue présence du mâle au nid (voir plus haut).
L'absence au nid de près de 1 heure le 19 mai suggère que la couvaison n'avait pas encore commencé ce jour-là. La couvaison aurait donc commencé entre le 20 mai (je n'ai pas fait d'observation ce jour-là) et le 23 mai. Compte tenu de la durée d'incubation de 32 à 35 jours des faucons pèlerins, on pourrait donc s'attendre à des naissances à partir du 21 juin.

Rappelons pour finir qu'en 2014, la nidification avait échoué après plusieurs semaines d'incubation. Il s'agissait alors vraisemblablement de la première tentative de nidification pour ce couple de faucons pèlerins. Depuis, ils ont gagné en expérience, notamment avec la nidification réussie l'an dernier à l'église Saint-Marc. Il ne reste plus qu'à attendre et espérer...

    vendredi 13 mai 2016

    Changements de comportement à l'Incinérateur des Carrières

    Ces derniers jours le comportement des faucons pèlerins de l'Incinérateur des Carrières a nettement changé. Le changement le plus remarquable est la fin des attaques contre les corbeaux, du moins de la part de la femelle. On constate également des différences au niveau des perchoirs utilisés ainsi que dans leurs routines de vol. La raison de ces changements n'est pas claire. Parmi les explications possibles, un manque d'énergie de la femelle causée par une éventuelle ponte ainsi que par la fatigue accumulée en combattant les corbeaux (et d'autres faucons?);  la fin du projet de fonder une famille; mais aussi la possible apparition d'un nouveau faucon...

    Voici quelques observations faites ces derniers jours.

    Mercredi 11 mai: 2 accouplements en 1 heure + attaques contre les corbeaux + possible longue présence du mâle au nid

    2 minutes après mon arrivée à l'Incinérateur à 19h, un faucon pèlerin a attaqué de l'autre côté de la voie ferrée un corbeau qui venait de quitter le nid. Cette attaque a été suivie d'une longue réunion (environ 10 minutes) des 2 faucons au nid. Les 2 faucons sont ensuite sortis s'accoupler à 19h17 au coin sud-ouest du toit de l'incinérateur. Après cet accouplement le mâle est allé se percher au coin sud-est de l'incinérateur.

    J'ai constaté sa disparition de ce perchoir à 19h48 en même temps que je voyais un oiseau se diriger vers le nid. J'observais à ce moment depuis la rue Saint-Grégoire de l'autre côté des voies ferrées; il m'est donc difficile d'être certain que le faucon a rejoint le nid. Mais par la suite la femelle a à plusieurs reprises communiqué, ce qui suggérait que le mâle était toujours présent dans le secteur. Et malgré mes efforts je n'arrivais pas à le localiser sur les cheminées. Puis à 20h18 un autre accouplement a eu lieu. Je n'ai pas vu d'où est parti le mâle mais un cri de protestation du corbeau suggère qu'il est sorti du nid.

    Après l'accouplement le mâle a quitté le secteur en volant à basse altitude le long de la rue Gerry Boulet (une direction de départ qui n'est pas inhabituelle pour Éole) La femelle a rejoint le nid 5 minutes plus tard. Mais elle en est presque immédiatement ressortie pour attaquer un corbeau qui s'en venait à son nid. Elle a passé par la suite quelques minutes à l'extérieur avant de disparaitre de son perchoir à 20h33.

    Si le mâle a effectivement passé 30 minutes seul au nid, cela pouvait être un premier signe de la présence d'un œuf. Les 2 accouplements observés en peu de temps étaient aussi encourageants. J'ai donc décidé de revenir le lendemain pour tenter de confirmer la chose.

    Jeudi 12 mai: 1 accouplement et aucune attaque sur les corbeaux

    Je suis arrivé à l'Incinérateur à 16h30. Un accouplement - le seul que j'ai vu en 3h - a eu lieu à 17h22 sur la cheminée ouest, à en juger par les cris. D'après mes vidéos, un faucon a quitté le nid une minute avant. Je n'ai pas visionné la totalité de mes plus que 2h30 de vidéo mais ce que j'ai vu sur place ne m'a pas laissé sur l'impression que le nid avait été occupé en quasi-permanence.

    Plus intéressant, c'est l'absence d'attaque sur les corbeaux. Après l'accouplement, la femelle est restée sur la passerelle à mi-hauteur de la cheminée ouest jusqu'à 19h23. Pendant ces 2 heures elle était idéalement placée pour lancer des attaques. Pourtant elle n'a rien fait. Et ce n'est pas faute d'occasions. Par exemple à 18h07, les 2 corbeaux étaient au nid. Un premier corbeau a quitté en direction des voies ferrées sans être inquiété. L'autre corbeau a suivi quelques instants plus tard puis a fait demi-tour au-dessus de la piste cyclable et est revenu au nid.  En fait on aurait presque dit que les corbeaux multipliaient les occasions de voler près de leur nid! À une seule occasion j'ai entendu quelques cris d'alarme, provenant d'un faucon possiblement au nid. C'était avant l'accouplement.

    La femelle a quitté à 19h23 son perchoir de la cheminée ouest en direction de la rue des Carrières. À 19h27 un faucon a rejoint le nid; rien ne permet de penser qu'il y avait un autre faucon au nid à ce moment.

    Vendredi 13 mai: aucune attaque de la femelle, changements de perchoir, possibilité de présence d'un nouveau faucon

    Je suis arrivé à l'Incinérateur à 8h. À 8h35 j'ai repéré un faucon sur la passerelle supérieure de la cheminée ouest mais du côté de la rue des Carrières. De façon générale, les faucons se tenaient principalement du côté de la rue des Carrières, ce qui constitue un changement par rapport à mes observations des derniers jours.

    À 8h42, un faucon entre au nid et on entend des cris... J'ai immédiatement pensé qu'un 2ième faucon s'y trouvait mais la suite des événements suggère que ce n'était pas le cas.  Les cris ont continué pendant plus de 4 minutes sans qu'il ne se passe rien. Puis il s'est passé quelque chose d'inattendu: par 4 fois un faucon a volé jusqu'à l'entrée droite du nid avant de rebrousser chemin! Finalement il s'est éloigné vers la rue des Carrières en volant au-dessus du flanc droit de l'incinérateur (ce type de parcours s'est reproduit par la suite; or je ne me souviens pas avoir vu un faucon utiliser cette trajectoire auparavant). Il a possiblement contourné l'incinérateur puisqu'un faucon est entré au nid par la gauche quelques instants plus tard. À moins qu'il s'agissait d'un autre faucon.

    La vidéo ci-dessous montre la scène. 


    Cette observation me rappelait celle que j'avais faite le 16 avril. Ce jour-là la femelle était allée au nid et par ses cris avait tenté d'y attirer un mâle non bagué. Le mâle s'était contenté d'observer depuis différents perchoirs mais n'était pas allé au nid. Les cris de la femelle aujourd'hui semblaient identiques. La différence avec aujourd'hui est peut-être que le mâle s'est suffisamment enhardi pour à tout le moins essayer d'aller au nid. Si c'est le cas, se pose évidemment la question de savoir si Éole est toujours présent.

    Comme les faucons se tenaient principalement du côté de la rue des Carrières, j'ai fini par abandonner mon projet de surveiller les entrées/sorties du nid et je me suis déplacé sur la rue des Carrières pour tenter de comprendre ce qui se passait.

    À 10h25 un accouplement a eu lieu sur la cheminée Est. Le mâle est venu se percher tout à côté de la femelle. Puis a fait un petit bond pour s'accoupler. Le mâle a ensuite visité différents perchoirs, incluant l'ancien nid de corvidé sur la cheminée Est. Puis il a attaqué à plusieurs reprises quelque chose de l'autre côté des voies ferrées. Je n'ai pas pu voir sa cible mais il n'est pas exclu que c'était un corbeau perché sur le toit d'un immeuble; plusieurs attaques similaires avaient en effet eu lieu les jours précédents.

    À 10h53 un faucon a quitté le nid par la droite.

    Quand j'ai quitté à 11h17, un faucon venait juste de se poser sur la cheminée ouest avec un gros lunch.


    Conclusion

    Le nid continue à être visité fréquemment mais il ne semble pas être occupé suffisamment longtemps pour conclure à la présence d’œufs. La fin des attaques de la femelle sur les corbeaux pourrait signifier qu'il n'y aura pas de ponte (les changements de perchoir pourraient aussi s'expliquer ainsi); mais d'un autre côté les accouplements se poursuivent. Et finalement il y a ces comportements étranges d'un faucon qui pourraient suggérer qu'il y a peut-être eu un changement dans la composition du couple.
    Bref, difficile de dire ce qui se passe en ce moment à l'Incinérateur!


      










    mercredi 11 mai 2016

    Eve a-t-elle attaqué l'université de Montréal? Et Éole a-t-il sauvé la vie de Spirit en l'abandonnant?

    Dans la 2ième moitié d'avril, plusieurs faucons pèlerins ont attaqué les faucons pèlerins de l'Université de Montréal, ce qui a conduit à l'échec de la nidification sur ce site. Le groupe des assaillants comprenait au moins une femelle et au moins un mâle qui semblaient agir de concert.

    Un faucon pèlerin qui pouvait avoir des raisons d'attaquer l'Université de Montréal est Eve, l'autre femelle d'Éole. Bien qu'il n'y ait aucun début de preuves solides sur sa responsabilité dans les attaques, je rassemble dans cet article différents éléments qui pointent vers elle.

    Je soutiens également la thèse que si Eve a attaqué l'Université de Montréal, Éole a possiblement sauvé la vie de Spirit en abandonnant cette dernière, ce qui aurait eu pour effet de rediriger l'énergie d'Eve vers sa propre nidification.

    Avertissement: cet article contient une bonne dose de spéculations et d'anthropomorphisme!

    Le triangle amoureux Eve - Eole - Spirit 

    Éole est réapparu pour la première fois au printemps 2014 alors qu'il tentait de nicher avec une femelle non baguée à l'Incinérateur des Carrières. Cette femelle a été nommée Eve par Richard Dupuis, en hommage à Eve Belisle. Éole est né au printemps 2011 à l'Université de Montréal, ce qui lui a valu d'être bagué.

    À l'automne 2014, Éole rejoint sa mère Spirit à l'Université de Montréal, alors que pendant le même temps son père Roger disparait mystérieusement.

    Début 2015, les accouplements entre Spirit et Éole consacrent le nouveau couple. Le 3 avril, coup de théâtre: alors que Spirit est en retard de plusieurs jours sur sa date habituelle de ponte,  Éole est observé à l'Incinérateur des Carrières avec Eve! Puis le 7 avril Éole est remplacé à l'Université de Montréal par un nouveau mâle, nommé Arthurin. Éole se consacre dès lors sur son couple avec Eve. Fin avril le couple déménage brusquement à l'église Saint-Marc où ils donneront naissance à 4 fauconneaux. Dès que les fauconneaux sont en état de faire le voyage, la famille se réinstalle à l'Incinérateur des Carrières.

    À l'automne 2015 cependant, Éole reprend sa place à l'Université de Montréal auprès de Spirit. On ignore ce qui est advenu d'Arthurin.


    Automne 2015: incursions d'Eve dans le territoire de l'Université de Montréal

    À partir de novembre, Éole est donc de retour à l'Université de Montréal. Mais potentiellement plus inquiétant pour Spirit, Eve y est observée elle aussi: une première fois le 14 novembre dans le nichoir avec Éole puis à nouveau le 30 novembre. Ces 2 visites ont été captées par la caméra qui surveillait le nichoir, c'est-à-dire un endroit très restreint de la tour de l'Université de Montréal. On peut facilement imaginer que d'autres visites ont eu lieu, qui n'ont pas été documentées.

    Début 2016: Eve doit se trouver un nouveau nid

    Depuis qu'elle est connue, Eve a niché - ou tenté de nicher - à 2 endroits: l'Incinérateur des Carrières et l'église Saint-Marc.

    Un problème récurrent à l'Incinérateur des Carrières est le dérangement humain causé par l'escalade illégale de l'Incinérateur et de ses cheminées. Est-ce ces dérangements qui ont occasionné le déménagement in extremis d'Éole et d'Eve à l'église Saint-Marc au printemps 2015? On l'ignore. Mais début 2016, l'incinérateur est encore moins accueillant pour les faucons pèlerins pour une autre raison: un couple de grands corbeaux a construit son nid à quelques mètres de l'endroit qu'utilisaient les faucons pèlerins pour nicher. Or la rivalité entre ces 2 espèces est bien connue.

    Quant à l'église Saint-Marc, des dispositifs anti-oiseaux destinés à empêcher les pigeons (et les faucons) d'accéder aux corniches ont été installés à l'automne 2015, rendant très difficile une nouvelle nidification à cet endroit.

    Au début 2016, les 2 endroits utilisés dans le passé par Eve pour nidifier sont donc inutilisables, ou en tout cas difficiles à utiliser. D'un autre côté, l'Université de Montréal figure sans doute parmi les meilleurs endroits en ville où nicher pour un faucon pèlerin. Le seul obstacle est Spirit, mais celle-ci se fait vieille donc est vulnérable. Et Éole qui est en couple avec Spirit... En attaquant Spirit, Eve pourrait faire d'une pierre 2 coups: gagner un endroit sécuritaire où nicher et récupérer Éole... À tout le moins d'un point de vue humain, Eve a des mobiles!


    Les coïncidences des 16 et 17 avril

    Le 16 avril j'observe, à l'Incinérateur des Carrières, Eve tenter d'attirer un mâle non bagué dans le nid qu'elle avait utilisé en 2014. Le mâle ne semblait pas du tout convaincu... Perché un peu plus haut, il regardait alternativement la femelle qui l'appelait et les grands corbeaux sur leur nid juste à côté qui grondaient! Après 15 minutes passées au nid, Eve a semblé comprendre qu'il n'y avait aucun espoir. Elle a quitté le nid, a lancé un cri qui ressemblait à un cri d'alarme et s'est éloigné en direction du parc Laurier. Le mâle est immédiatement parti à ses trousses. Il était alors 18h.

    Comme leur direction de départ était plus ou moins celle de l'église St-Jean-Baptiste, qui est connue pour être un endroit fréquenté par Eve, je me suis rendu à cette église. À 18h30 aucun faucon n'y était visible. Mais à 19h40, lors d'une 2ième visite, je suis arrivé juste à temps pour voir 2 faucons pèlerins quitter les lieux.

    L'impression que j'ai retenu de ces observations est qu'Eve avait trouvé un nouveau compagnon et qu'elle cherchait un endroit où nicher.

    Je suis revenu le lendemain à l'Incinérateur des Carrières vers 16h. Aucun faucon n'était visible. Pour décider si j'allais rester ou non, j'ai allumé mon iPhone et j'ai jeté un coup d’œil à la caméra de Faucons de l'UdeM: les œufs étaient délaissés et surtout, on entendait des cris qui suggéraient la présence d'au moins un faucon intrus. Je me suis dit que les faucons que je cherchais à voir étaient à l'Université de Montréal et que donc je perdais mon temps à l'Incinérateur. Malheureusement je ne me rappelle plus à quel moment exactement j'ai consulté la caméra de l'Université de Montréal; cependant j'ai quitté l'Incinérateur à 17h. Un peu plus tard j'ai décidé d'aller à l'Université de Montréal où j'ai été témoin d'une importante bataille impliquant 4 faucons pèlerins à partir de 18h35.

    Fait intéressant: peu de temps avant mon arrivée à l'incinérateur, entre 15h25 et 15h36, Paul Fortin et un autre observateur ont observé un couple de faucons pèlerins harceler la famille de grands corbeaux à l'Incinérateur d'après ce rapport eBird. Il n'est pas clair si le mâle était le même que celui que j'avais vu la veille ou si c'était Éole.

    Récapitulons: entre 15h25 et 15h36, 2 faucons pèlerins harcèlent les corbeaux à l'incinérateur. Ces faucons ne sont plus là à 16h08. Puis quelque part entre 16h08 et 17h je constate via la caméra de l'Université de Montréal des signes indiquant la présence d'au moins un intrus à l'Université de Montréal. Sur place à l'Université de Montréal à partir de 18h30, je constate que les intrus sont 2. Bien entendu rien ne prouve que les 2 faucons de l'incinérateur et les 2 faucons intrus de l'Université de Montréal étaient les mêmes, mais la coïncidence est troublante.

    J'ajoute un dernier élément. Bien que je me garderai toujours d'affirmer que 2 faucons sont le même individu basé uniquement sur leur aspect, le mâle qui accompagnait Eve le 16 avril à l'Incinérateur a une certaine ressemblance avec le mâle intrus photographié le même jour à l'Université de Montréal.
    Intrus mâle à l'Université de Montréal, 16 avril (crédit: Eve Belisle,  http://ornithologie.ca/faucons/)


    Mâle à l'Incinérateur des Carrières, 16 avril
    La photo à l'Université a été prise vers midi 30, celle à l'Incinérateur des Carrières à 17h43. Le faucon de l'incinérateur semble en revanche différent de l'intrus photographié à l'Université de Montréal le 17 avril, jour de la bataille (voir la photo et la vidéo publiées par Faucons de l'UdeM). Mais si 2 faucons mâles intrus différents ont été photographiés à l'Université de Montréal à 2 jours d'intervalles, rien n'empêche que ces 2 faucons étaient tous deux présents le 17 avril: malgré sa puissance, la caméra ne peut surveiller qu'une faible fraction de ce qui se passe.


    Observations de faucons pèlerins dans les secteurs fréquentés par Eve du 16 avril au 3 mai

    Je rassemble dans cette section toutes les observations de faucons pèlerins dans les secteurs fréquentés par Eve pendant les évènements de l'Université de Montréal. Je rappelle qu'Eve n'est pas baguée - et donc pas identifiable de façon certaine. De plus, ces secteurs sont aussi fréquentés à l'occasion par d'autres faucons pèlerins. À mon avis, ces observations ne peuvent être utilisées ni pour appuyer la thèse de la participation d'Eve aux attaques de l'Université de Montréal, ni pour infirmer cette hypothèse. Mais je les mentionne pour être complet.

    4 secteurs sont connus pour être utilisés par Eve: l'Incinérateur des Carrières, l'église St-Michel-Archange, l'église Ste-Madeleine d'Outremont et l'église St-Jean-Baptiste.

    Incinérateur des Carrières

    Comme déjà mentionné, Eve était présente à l'Incinérateur des Carrières le 16 avril de 17h30 à 18h (je considère que c'était Eve à cause de son séjour au nid de 2014).

    Le lendemain 17 avril, je n'ai vu aucun faucon à 9h40 ni de 16h08 à 17h. En revanche Paul Fortin rapporte avoir observé 2 faucons pèlerins houspiller la famille de grands corbeaux entre 15h25 et 15h36 d'après ce rapport eBird.

    Le 23 avril, suite au signalement par Sandy d'un faucon sur une cheminée en fin de matinée, j'observe à mon tour un faucon sur la cheminée Est à 14h40. Il s'est envolé 5 minutes plus tard et s'est lentement éloigné en décrivant des cercles en direction du métro Rosemont.

    Le 29 avril vers 10h, un faucon pèlerin est observé sur la cheminée Ouest par Sandy.

    Le 3 mai, j'observe 2 faucons pèlerins attaquer le couple de grands corbeaux qui niche sur une passerelle de la cheminée Est. Le mâle sera identifié quelques jours plus tard comme étant Éole; l'autre faucon était Eve.

    J'ai également fait plusieurs courtes visites qui ne m'ont pas permis de voir de faucon les 20, 21, 25, 27 et 28 avril.

    Église Saint-Michel-Archange

    Le 18 avril à 17h13, un faucon pèlerin était perché sur la croix du clocher, sous la pluie.

    Le 20 avril à 19h43, un faucon pèlerin était présent dans une des 'loges' du clocher. Il y était toujours à 20h30 quand j'ai quitté.

    Le 21 avril peu après 18h30, 2 faucons pèlerins viennent se percher sur le clocher à quelques secondes d'intervalle. J'étais alors sur le viaduc Van Horne. Au moins un des faucons venait de l'autre côté du viaduc. Un faucon est presque immédiatement reparti; l'autre a disparu pendant que je me rendais sur place. Voici une vidéo de leur arrivée. Un peu plus tard j'ai trouvé un faucon à l'église St-Jean-Baptiste.

    Le 28 avril à 19h30, un faucon pèlerin se pose sur le clocher. Il venait du sud, dans l'axe de la rue St-Urbain. Il s'est envolé 10 minutes plus tard approximativement dans la direction de l'église Ste-Madeleine d'Outremont mais une visite à cette église n'a rien donné.

    Église Sainte-Madeleine d'Outremont

    À part un oiseau non identifié sur le clocher aperçu depuis le viaduc Van Horne le 25 avril à 9h52 et qui avait disparu lors de mon arrivée, rien à signaler pendant cette période.

    Église Saint-Jean-Baptiste

    Comme je l'ai déjà mentionné plus haut, le 16 avril vers 19h40 j'observe 2 faucons pèlerins qui s'éloignent.

    Le 21 avril à 19h24 un faucon pèlerin s'envole de dessous le toit et va se percher à un des endroits qu'Eve semble utiliser pour passer la nuit. Il y était toujours à 19h44 quand j'ai quitté. Cette observation suit d'un peu moins de 1 heure celle de 2 faucons pèlerins à l'église St-Michel-Archange.

    Le 24 avril entre 19h45 et 20h30, je n'observe aucun faucon.

    Le 26 avril à 20h13 je remarque un faucon pèlerin sous le toit. Il rejoint son perchoir de nuit à 20h27.

    Le 29 avril à 20h33, un faucon pèlerin est présent à un des perchoirs de nuit.

    Le 30 avril peu avant 19h, Sandy observe un faucon pèlerin sous le toit.

    Les coïncidences de la fin de la bataille

    Il y a eu des intrusions à l'Université de Montréal jusqu'à au moins le matin du 3 mai. Mais je n'ai pas connaissance qu'il y en a eu par la suite. Or l'après-midi du 3 mai je découvrais Eve avec un faucon pèlerin bagué qui s'est avéré plus tard être Éole à l'Incinérateur des Carrières. Y-a-t-il coïncidence entre la fin de la tourmente à l'Université de Montréal et le fait qu'Eve soit occupée à combattre les corbeaux à l'Incinérateur?

    Il faut être prudent ici puisque dans la mesure où Spirit avait vraisemblablement abandonné sa couvée (malgré quelques séjours sporadiques au nid), on ne disposait plus de l'indicateur "absence au nid" pour déceler indirectement les intrusions. Il est aussi normal qu'à partir du moment où il y a un vaincu (Éole a été remplacé le 1er mai), les intrusions diminuent ou cessent.

    Cependant Spirit semblait très vulnérable à ce moment-là, en particulier à cause de sa blessure à la patte qui la faisait beaucoup boiter. Pourquoi son adversaire a-t-elle arrêté les attaques? Spirit lui a-t-elle infligé des blessures qui l'ont forcé à cesser les attaques? C'est une possibilité.

    Une autre question est posée par la reconstitution du couple Éole - Eve. Eole a été remplacé à l'Université de Montréal le 1er mai, et le 3 mai il attaquait les corbeaux au côté d'Eve à l'Incinérateur des Carrières. Pourtant Eve avait été vue en compagnie d'un autre mâle: le 16 avril à l'incinérateur (et le 17 avril si le mâle n'était pas Éole), et probablement le 22 avril à l'église St-Michel-Archange. Qu'est-il arrivé à ce mâle? Si Eve n'était pas impliquée dans les attaques, on aurait pu s'attendre à ce qu'elle se mette en couple avec cet autre mâle (ou avec un autre). Mais dans ce cas Éole aurait du chasser ce mâle, ce qu'il aurait fait malgré ses blessures. Encore une fois, ce n'est pas impossible. On ne peut pas tout à fait exclure non plus qu'Eve n'a jamais été en couple avec un autre mâle pendant cette période, malgré qu'elle ait été vue avec un mâle.


    Conclusions

    Eve était directement concernée par ce qui s'est passé à l'Université de Montréal: il s'agit d'un territoire voisin du sien dans lequel elle a pénétré à plusieurs reprises dans le passé, et le mâle résidant de l'Université de Montréal est aussi le sien. Il est difficilement imaginable qu'Eve n'ait pas au moins suivi les évènements.   La vraie question est cependant si Eve a participé activement aux combats contre Spirit. Cette question reste pour l'instant sans réponse.

    Ce qui s'est passé à l'Université de Montréal était complexe, avec probablement bien plus que 4 faucons d'impliqués, et on ne saura sans doute jamais ce qui s'est vraiment passé. Voici néanmoins une ébauche de scénario. Eve et un mâle cherchent un endroit où nicher. Ils explorent l'incinérateur, l'église St-Jean-Baptiste et peut-être d'autres sites. Le 17 avril le couple décide d'attaquer Spirit et Éole. Spirit et Éole échouent à repousser les attaques, ce qui a pour effet d'attirer d'autres faucons qui espèrent profiter de la situation (cet afflux de faucons pèlerins opportunistes lorsque les faucons pèlerins résidants sont en situation de faiblesse a été observé à plusieurs sites, voir par exemple le forum BCAW). Durant les combats, le compagnon d'Eve est blessé ou tué (la capacité d'Éole à reconquérir à chaque fois l'Université de Montréal suggère que c'est un bon guerrier). Eve se retrouve seule. Éole décide qu'il est temps de commencer sa seconde nidification - ou bien est forcé par un autre mâle d'abandonner l'université de Montréal.

    Et si c'était Éole qui avait commencé la guerre? Éole considère manifestement Eve et Spirit comme ses femelles. Lorsque les choses ont commencé à devenir sérieuses entre Eve et un autre mâle, Éole a très bien pu décider d'attaquer ce dernier. Cette situation rappelle ce qui s'est passé en 2015 lorsque 2 mâles, dont Éole, ont été observés à l'Incinérateur des Carrières à la même période de l'année. Est-ce que la bataille entre ce mâle et Éole aurait pu se déplacer à l'Université de Montréal, entrainant du coup Eve dans le conflit? Je ne fais que poser la question.

    La saga impliquant Eve, Spirit et Éole n'est pas terminée. Les évènements de 2017 apporteront-ils un éclairage sur ce qui s'est passé cette année à l'Université de Montréal ? À suivre...

    Note: cet article a été publié en janvier 2017.

    Une guerre entre faucons pèlerins provoque l'échec de la nidification à l'Université de Montréal

    Les faucons pèlerins de l'Université de Montréal n'auront pas eu de bébé cette année. La raison ? Des attaques à répétition par d'autres faucons pèlerins qui ont forcé Spirit (la femelle) et Éole (le mâle) à délaisser leurs 4 œufs pour défendre leur territoire contre les assaillants.

     

    À propos des sources

    Le contenu de cet article est basé sur plusieurs sources, dont la plus importante est certainement les images de la caméra de Faucons de l'UdeM. Faucons de l'UdeM est opérée par Eve Belisle et Richard Dupuis, que je remercie pour rendre publiques ces images ainsi que pour la permission d'inclure certaines d'entre elles dans ce blogue. Mentionnons aussi que c'est à l'initiative d'Eve Belisle que le nichoir a été installé en 2008: sans nichoir il n'y aurait évidemment rien à raconter.

    Faucons de l'UdeM distribue de plusieurs façons les images prises par la caméra - je reviendrai sur cela un peu plus loin - mais bien entendu il n'est pas possible de rendre public de façon durable l'intégralité de toutes les images prises par la caméra en raison du volume d'information que cela représenterait. Heureusement la caméra est suivie par de nombreuses personnes partout dans le monde, qui décrivent ce qu'elles voient et/ou partagent des enregistrements vidéo ou photographiques dans des forums. Le forum qui m'a été le plus utile est Birds Cam Around the World (BCAW). Ce forum s'intéresse aux nids d'oiseaux de proie suivis par caméra, principalement aux États-Unis mais aussi ailleurs dans le monde (Canada, Australie, certains pays européens). Chaque nid a son sous-forum, voici celui de l'Université de Montréal. Je mentionne également le forum Polonais peregrinus.pl qui lui aussi a un sous-forum consacré aux faucons de l'Université de Montréal où des photos prises par la caméra sont régulièrement publiées.
    Enfin, une dernière source d'information est constituée des observations sur place: les miennes, celles de Richard Dupuis rapportées sur la page Facebook de Faucons de l'UdeM ainsi que des observations rapportées sur eBird.

    Afin de mieux comprendre ce qui suit, il faut que je décrive brièvement le dispositif de Faucons de l'UdeM. Faucons de l'UdeM dispose de 2 caméras: une caméra fixe branchée à un télescope et positionnée dans le bureau d'Eve Belisle, et une caméra manœuvrable fixée au-dessus du nichoir. La première caméra n'était pas opérationnelle pendant la période concernée à cause de travaux sur la façade de l'édifice où est située le bureau d'Eve Belisle (cette caméra n'aurait sans doute pas apporté de grands éclaircissements sur ce qui s'est passé; mais peut-être que les yeux d'Eve Belisle auraient pu faire une différence).  La deuxième caméra diffusait ses images de 2 façons: en continu, sur Youtube, avec une mémoire de 2 heures; et en time lapse en affichant une photo toutes les 10 secondes environ (ces 2 diffusions sont rassemblées sur cette page). Par ailleurs, toutes les 30 secondes une photo était enregistrée dans les archives, lesquelles archives ont typiquement une durée de vie de quelques semaines.
    Finalement certaines photos et extraits vidéos étaient publiées sur la page Facebook de Faucons de l'UdeM et sont encore consultables. Une partie du dispositif est pilotée par un ordinateur. Et comme tout ordinateur, il lui arrivait parfois de mal fonctionner, ce qui affectait une partie plus ou moins grande du dispositif.

    Une rapide mise en contexte

    Les premiers accouplements entre Spirit et Éole ont été observés le 12 mars. Il en a résulté 4 œufs, pondus entre le 31 mars et le 8 avril. Les naissances étaient attendues autour du 10 mai. À l'exception de 2012 où le nichoir avait du être retiré pour cause de travaux sur la tour, Spirit a eu des bébés chaque année depuis 2009.

    Le fil des évènements 

    Vue d'ensemble

    L'échec de la nidification a été causé par de trop longues interruptions de couvaison. La figure ci-dessous montre, en rouge, les absences des parents au nid, pour la période du 15 avril au 1er mai.


    Quelques mots sur comment cette figure a été obtenue. Les données de base sont les photos archivées par Faucons de l'UdeM, principalement celles archivées de 6h à 20h. À cause du temps de traitement des photos, cela correspond approximativement à la période de temps de 5h53 à 19h53. La figure comprend 4 couleurs, qui ont les significations suivantes:
    • Rouge: période ou aucun adulte n'est présent au nichoir;
    • Vert: période où au moins un adulte est présent au nichoir. À noter que l'adulte n'est pas nécessairement en train de couver pendant cette période: à plusieurs occasions l'adulte se tenait au seuil du nichoir.
    • Gris foncé: période où les archives photos étaient en panne;
    • Gris clair: période pendant laquelle la caméra n'était pas braquée sur le nichoir. Une telle période n'est indiquée par cette couleur que lorsqu'elle est suffisamment longue. Pour des périodes courtes (moins de 2 minutes), une extrapolation a été faite: par exemple si un adulte était au nid avant et après la période où la caméra ne surveillait pas le nid, il a été supposé que l'adulte était au nid pendant toute la période. Si un adulte a quitté le nid au milieu d'une de ces petites périodes ou bien est revenu au nid, il a été supposé également que l'adulte était au nid pendant toute la période.  

    17 avril: la tour sous attaque

    La première absence notable des adultes au nid est observée le soir du 17 avril immédiatement après le redémarrage des archives à 19h06. Mais ces absences avaient commencé bien plus tôt. Entre 16h et 17h je tentais de revoir un couple de faucons pèlerins à l'Incinérateur des Carrières (je les y avais vus la veille). Les faucons n'étaient pas là. Mais la caméra du nichoir de l'Université de Montréal (consultée via mon iPhone) montrait des œufs laissés sans surveillance et on entendait  des cris qui suggéraient la présence de un ou plusieurs faucons intrus. Dans un premier temps je suis retourné à l'UQAM avec l'intention de garder un œil sur ce qui se passait à l'Université de Montréal via la caméra, puis frustré de ne voir que les œufs je suis monté à l'Université de Montréal où je suis arrivé à 18h30. J'ai alors assisté à une bataille importante impliquant au moins 2 assaillants (un mâle et une femelle). En particulier je me souviendrai toujours de ces 2 femelles qui se sont accrochées par les pattes en plein vol et qui sont tombées en tournoyant vers le sol... Pour plus de détails je vous invite à consulter l'article que j'ai écrit immédiatement après l'observation, ainsi que la publication de Faucons de l'UdeM. Richard Dupuis (rapport eBird) et Paul Fortin (rapport eBird avec vidéo) étaient également présents à partir de 19h30.

    Alors qu'habituellement c'est Spirit qui couve pendant la nuit, elle semblait absente lorsque le jour s'est levé le lendemain matin. Lorsqu'elle est finalement arrivée au nichoir vers 6h45, elle était blessée au bec comme le montre cette photo publiée par Faucons de l'UdeM. Éole de son côté ne semblait pas blessé.

    25 au 28 avril: nouvelles vagues d'attaque

    Le 25 avril les œufs sont laissés seuls en plein soleil pendant plus de 1 heure à partir de 9h du matin. La durée totale d'absence pour la journée s'élève à 148 minutes.

    Le 26 avril est un peu plus calme avec une absence totale de "seulement" 88 minutes.

    Mais le 27 avril ce chiffre montre à 247 minutes (plus de 4 heures). Eve Belisle a observé 3 faucons dont 2 mâles sur l'heure du midi. Une blessure au dos est remarquée chez Éole à son retour au nichoir à 15h30 après une absence de 79 minutes. Entre 14h et 16h, 2 faucons pèlerins sont observés perchés dans un arbre du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges d'après ce  rapport eBird. Vers 16h10 j'observe brièvement 4 faucons à l'Université de Montréal.  puis de nouveau 3 faucons à partir de 19h dont 2 qui semblaient être des femelles.

    Le 28 avril, la durée totale d'absence au nid est de 224 minutes avec notamment une absence de plus de 2 heures à partir de 17h47, ainsi qu'une absence de près de 1 heure peu après 13h. D'après un observateur ('Matrix') qui s'exprimait sur le forum BCAW, Éole était le seul à couver ce jour-là (alors que c'est en principe la femelle qui assure la plus grande partie de la couvaison), ce qui explique en partie les absences. Spirit couvait pendant la nuit.


    1er mai: Éole est remplacé

    Le 1er mai au matin la caméra capte des déplacements rapides de faucons dans le ciel. Puis plus tard dans la journée, un intrus mâle est longuement observé sur la tour sans être inquiété, signe qu'Éole a abandonné la place (j'ai pu constater ceci personnellement de 15h45 à 17h30). Voici quelques vidéos et photos sur les premières heures de l'intrus - plus tard dénommé Bret - à l'Université de Montréal:


    3 mai: reprise des accouplements

    Le 3 mai, les premiers accouplements entre Spirit et le nouveau mâle sont observés. Voici la vidéo de l'accouplement de 6h30 publiée par Faucons de l'UdeM (l'accouplement est difficile pour Spirit, qui est alors blessée à une patte). Un autre accouplement a eu lieu plus haut sur la tour à 10h06. La situation était très confuse puisqu'au moins un 3ième faucon était présent par intermittence entre 6h28 et 10h23, période où j'étais à l'Université.

    3 au 6 mai: Éole identifié à l'Incinérateur des Carrières...

    Très sceptique par rapport à l'idée que Éole - qui était blessé - puisse recommencer une nidification ailleurs en 2016, j'ai quand même fini par me rendre à l'Incinérateur des Carrières le 3 mai en après-midi. À ma grande surprise j'y ai trouvé 2 faucons pèlerins qui attaquaient à répétition 2 grands corbeaux, qui eux tentaient de nourrir leurs bébés à leur nid situé juste en-dessous de l'endroit convoité par les faucons pèlerins!  Un des faucons semblait bagué. La confirmation qu'il s'agissait bien d'Éole est venue le 6 mai sous la forme d'une photo par Julie Olivier-Vaillancourt. L'autre faucon était de toute évidence Eve, la 2ième femelle d'Éole, avec qui il avait eu 4 petits à l'église Saint-Marc en 2015 (ils s'étaient cependant accouplés à l'Incinérateur des Carrières, ce qui explique pourquoi je suis allé à cet endroit). Des accouplements ont été observés dès le 3 mai.

    9 mai 2016: retrait des œufs

    Le 9 mai, la décision a été prise par Faucons de l'UdeM de retirer les œufs du nid. Les œufs ont été confiés à l'UQROP pour déterminer leur viabilité, et le cas échéant, les placer en couveuse. Voici l'annonce par Faucons de l'UdeM du retrait des œufs.
    Pendant ce temps, Spirit et Bret continuent de s'accoupler, ce qui laisse un mince espoir que Spirit ponde d'autres œufs.

    Observations diverses

    Je rapporte ici que les observations les plus notables publiées sur eBird et qui n'ont pas déjà été citées dans cet article. L'ensemble des observations est accessible via le moteur de recherche de eBird.
    • Denis Tétreault publie sur eBird 2 photos d'un faucon pèlerin perché sur l'antenne de la tour. Les photos ont été prises entre 9h45 et 11h le 18 avril.
    • Le 21 avril, quelque part entre midi et 13h30, Jean-Sébastien Mayer observe un faucon pèlerin intrus s'approcher de la tour et se faire rapidement chasser par les 2 faucons de l'Université de Montréal (rapport eBird).
    • Le 25 avril entre 7h et 8h du matin, Julie Tremblay photographie un faucon pèlerin au-dessus du cimetière (rapport eBird


    Les blessures

    Les 2 faucons pèlerins de l'Université de Montréal ont été blessés. Ces blessures ont cependant guéri par elles-mêmes, en particulier aucune intervention humaine n'a été nécessaire. On ignore tout de l'état de santé des autres faucons impliqués dans les batailles.

    Les blessures de Spirit

    Spirit a été la première chez qui une blessure a été constatée, et ce dès le 18 avril, le lendemain de la bataille spectaculaire du 17 avril. D'autres blessures ont été constatées plus tard.

    Après la bataille du 17 avril, nous étions tous anxieux de savoir s'il y avait eu des dégâts. À 6h40, Spirit n'avait toujours pas été revue au nichoir alors qu'il semblait qu'Éole avait couvé pendant la nuit (ce qui était inhabituel). Finalement Spirit est arrivée à 6h44, mais avec une blessure au bec. Voici l'annonce de la blessure par Faucons de l'UdeM ainsi qu'une photo de la blessure:

    Blessure au bec de Spirit (crédit: Eve Belisle, http://ornithologie.ca/faucons/)

    Le 30 avril, 'Matrix' sur le forum BCAW décrit l'état de Spirit ainsi: "Note the lump on her head, her cere, the blood n feather mix on her "face" and Her left foot is swollen at the junction of the toes, and looks like a bite mark at the same area". Il observe également qu'elle semble mettre tout son poids sur sa patte droite dans la plupart des photos d'archive et qu'elle a 2 tâches de sang sur sa poitrine sans qu'il soit clair si c'est le sang d'une proie ou son propre sang. Spirit continue néanmoins de faire sa toilette, ce qui est bon signe (source: forum BCAW). 

    On la voit boiter sur cette vidéo postée sur le forum BCAW le 1er mai. Tel que déjà mentionné plus haut, sa blessure à la patte gauche complique également le premier accouplement documenté avec le nouveau mâle le 3 mai.

    D'après Eve Belisle (communication personnelle), un problème avec la patte gauche était déjà apparent immédiatement après la bataille du 17 avril. De plus sa narine droite était gorgée de sang pendant plusieurs jours.

    Les blessures d'Éole

    Éole semble avoir été moins blessé que Spirit. Cependant le 27 avril en après-midi, après son retour au nichoir, il présentait une blessure au flanc. Voici une photo publiée par Faucons de l'UdeM.  La photo apparait également dans le forum BCAW.


    Combien y avait-il de faucons agresseurs? Et qui étaient-ils?

    Les agresseurs comprenaient au moins une femelle et au moins un mâle. Aucune photo de la femelle n'a pu été prise. La caméra a en revanche pu photographier à plusieurs reprises un faucon pèlerin mâle non bagué. Faucons de l'UdeM a publié un montage-photo montrant 3 de ces photos, ainsi que les photos de 2 faucons pèlerins non bagués déjà connus: Eve, la compagne d'Éole et Arthurin, le père des fauconneaux de 2015 à l'Université de Montréal. Difficile d'être catégorique mais il semble bien qu'il y avait plus que 1 faucon pèlerin mâle qui ont pénétré dans le territoire pendant ces 2 semaines.

    En début de saison, différentes raisons amenaient à craindre une attaque par Eve, l'autre compagne d'Éole. Bien que rien ne prouve qu'Eve ait effectivement participé à l'attaque, j'explore cette hypothèse dans cet autre article.


    Note: cet article a été publié en janvier 2017.

    dimanche 8 mai 2016

    Le faucon pèlerin Éole identifié à l'Incinérateur des Carrières

    Dans mon article du 3 mai je relatais qu'à l'Incinérateur des Carrières un couple de faucon pèlerin tentait de chasser un couple de grand corbeau qui nichait trop près de l'endroit que les faucons avaient choisi pour eux-mêmes nicher. Un de ces faucons pèlerins était bagué. Se posait donc la question de savoir qui il était. La réponse est venue le 7 mai par le biais d'une photo postée sur la page Facebook de Faucons de l'UdeM ainsi que sur la mienne, par Julie Olivier-Vaillancourt. La photo avait été prise la veille. Avec sa permission je la reproduis ici:

    Éole à l'Incinérateur des Carrières le 6/5/2016 (crédit photo: Julie Olivier-Vaillancourt)

    Surprise: il s'agit bien d'Éole (alias E83), né à l'Université de Montréal en 2011. Surprise parce qu'il avait disparu de l'Université de Montréal le 1er mai, après des combats territoriaux au cours desquels il avait été blessé. Il était alors le père de 4 œufs, pondus par sa partenaire Spirit, qui accessoirement est aussi sa mère... Au mieux on pouvait espérer qu'il était encore vivant quelque part, mais jamais je n'aurais imaginé qu'il puisse participer à une autre tentative de nidification cette année!

    mardi 3 mai 2016

    Faucons pèlerins contre corbeaux à l'Incinérateur des Carrières

    Après le drame de l'Université de Montréal, un autre drame se joue à l'Incinérateur des Carrières, 2 drames qui pourraient d'ailleurs ne pas être totalement indépendants l'un de l'autre.

    *** avertissement: la situation qui est décrite ci-dessous est cruelle. Âme sensible s'abstenir ***

    Il y a un peu plus de 1 mois, je rapportais qu'un couple de grand corbeau avait construit son nid sur une des passerelles de la cheminée Est de l'Incinérateur des Carrières. Il y a quelques jours j'ai découvert que des bébés étaient nés, aux cris qu'ils poussaient quand un adulte se rendait au nid.
    Tout semblait bien se passer pour la famille corbeau jusqu'à ce qu'un couple de faucons pèlerins décide de réutiliser le nid qu'ils avaient utilisé en 2014. Or l'entrée de ce nid est situé à quelques mètres à peine du nid de corbeau.

    Pour les faucons pèlerins, pas question de tolérer des corbeaux si proche de leur nid!

    Les corbeaux sont terrorisés, en tout cas c'est le sentiment que m'inspiraient leurs cris. Mais ils ont leurs bébés à nourrir... Alors ils continuent d'aller au nid. Parfois ça se passe bien.  Mais le plus souvent ils sont attaqués par un faucon pèlerin, parfois par les 2 en même temps. L'attaque peut venir du sommet d'une cheminée - dans ce cas le faucon arrive sur le corbeau avec une très grande vitesse ; ou bien elle peut venir d'un faucon qui est à son nid, ou bien d'un faucon en vol.
    Plusieurs des attaques ont fait mouche, un corbeau s'est même retrouvé au sol pendant quelques instants.


    Quelques attaques

    • Les 2 corbeaux sont sur la passerelle opposées à celle du nid et crient, apparemment terrorisés. Un des corbeaux se risque. Il s'est éloigné d'à peine quelques centimètres de la passerelle qu'il a été attaqué. Il est vivement retourné sur la passerelle. À ce moment-là les corbeaux m'apparaissaient comme des prisonniers, incapables de quitter la passerelle sur laquelle ils s'étaient réfugiés, à la fois loin et proche de leurs petits. Heureusement pour eux il y a aussi eu des périodes d'accalmie.
    • Un des corbeaux est perché sur le toit d'un lotissement de l'autre côté des voies ferrées. Il crie, (En passant, une petite pensée pour les personnes habitant ces logements!). Puis s'élance vers son nid. En s'approchant, ses cris augmentent en force, comme s'il défiait les faucons. Il est attaqué juste avant d'arriver à la cheminée Est. 
    • Un corbeau perché sur l'échelle de la cheminée Est, sous son nid, a été percuté par un faucon qui a plongé verticalement le long de l'échelle. 
    • L'autre corbeau a tenté de profiter de cette action pour rejoindre le nid mais a été repéré par un faucon qui l'a chargé. Déséquilibré, le corbeau s'est trouvé à faire du surplace devant la cheminée Ouest: l'autre faucon ne l'a pas raté! Le corbeau est tombé comme une feuille mais il a réussi quelques minutes plus tard à regagner un endroit sécuritaire.
    • Un corbeau quitte le nid, lève la tête et aperçoit un faucon en vol au-dessus de lui. Il n'a pas pris de chance: il est revenu sur la cheminée!
    • Et pour finir un petit frisson pour moi. À un moment donné je vois un corbeau surgir d'au-dessus des blocs de béton qui séparent la piste cyclable de l'incinérateur et se diriger lentement vers moi à basse altitude... Aussitôt je lève la tête pour voir s'il n'y a pas un faucon pèlerin qui risque d'attaquer le corbeau quand celui-ci passera au-dessus de moi: et bien oui, il y en avait un et il avait déjà repéré le corbeau... Je l'ai vu amorcer sa plongée et foncer... Heureusement pour moi le corbeau a eu le temps de me dépasser avant de croiser la trajectoire du faucon, et heureusement pour le corbeau un bouquet d'arbres a empêché le faucon de compléter son attaque.

    Voici une première vidéo:

     

    Un accouplement

    Après avoir attaqué quasi-simultanément un corbeau et l'avoir envoyé au tapis (voir plus haut), les 2 faucons se sont accouplés sur la balustrade du toit de l'incinérateur, au coin sud-ouest. À ma connaissance c'est le premier accouplement observé à l'Incinérateur cette saison. Un des faucons semble bagué à une des pattes.


    Intrusions humaines

    Comme si la situation n'était pas déjà assez tendue pour les faucons et les corbeaux, 2 individus sont passés juste au-dessus de leurs nids respectifs (rappelons que l'Incinérateur des Carrières est interdit d'accès). Cette fois je n'ai pas hésité: j'ai signalé l'incident. La police est rapidement arrivée mais j'ignore s'ils ont intercepté les individus. Un peu plus tard ce sont les cris d'alarmes d'un faucon pèlerin qui ont attiré mon attention sur 2 individus (les mêmes ou d'autres ?) qui descendaient de la bâtisse.

    Mon appel du 29 mars est plus que jamais d'actualité: toute personne aperçue au bord du toit,  du côté de la piste cyclable, sera immédiatement signalée à la police, et ceci tant que les nidifications seront en cours. Et j'invite tous les autres observateurs à faire de même.